Afrique face au covid-19: le devoir d’une réponse unifiée

Alors que la communauté mondiale se précipite pour ralentir et éventuellement stopper la propagation du COVID-19, cette pandémie qui a coûté la vie à des milliers de personnes et rendu malade des dizaines de milliers d’autres, Les pays africains retiennent leur souffle, et s’apprêtent à faire face à l’impact sanitaire et économique dévastateur de cette pandémie. Le virus s’est propagé dans des dizaines de pays en quelques semaines, forçant les gouvernements et les autorités sanitaires du continent à prendre des mesures drastiques pour limiter les retombées négatives.
Pour l’instant, les pays d’Afrique n’ont à leur disposition que des mesures préventives telles que la quarantaine, le confinement des citoyens et la généralisation des mesures barrières. Les pays africains comptent sur un réseau d’experts mandatés par l’Organisation Mondiale de la Santé pour coordonner les efforts de surveillance régionale de l’évolution de la situation épidémiologique, ce suivi permet d’anticiper les besoins en termes de soins et de traitement cliniques et d’identifier les stratégies capables de limiter la transmission à grande échelle.
Ces mesures de prévention de base pour les individus restent l’outil le plus puissant pour empêcher la propagation du COVID-19. Cependant, le confinement généralisé menace les chaînes d’approvisionnement alimentaire déjà vulnérables, en effet les fermetures dans au moins 33 des 54 pays d’Afrique ont empêché les agriculteurs d’acheminer de la nourriture vers les marchés et ont menacé la livraison de l’aide alimentaire aux populations rurales. Une grande partie des populations africaine travaille dans le secteur informel et doit sortir tous les jours afin de subvenir à ses besoins les plus élémentaires, or de nombreux marchés informels où des millions de personnes achètent leur nourriture sont actuellement fermés.
Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, environ une personne sur cinq en Afrique, c’est-à-dire près de 250 millions, n’avait pas suffisamment de nourriture avant l’épidémie et un quart de la population de l’Afrique subsaharienne était sous-alimentée. Cet état de fait est maintenant exacerbé par la propagation de la maladie, et le continent semble être livré à son sort puisque les pays les plus développés ont été les premiers à subir le choc sanitaire. Pour éviter le pire, les pays Africains ne pourront donc compter que sur la coopération intercontinentale et de la créativité des dirigeants Africains.
C’est dans ce contexte que Sa Majesté le Roi Mohammed VI a appelé les chefs d’Etat du Continent à établir un cadre opérationnel d’accompagnement des pays les plus vulnérables, dans la gestion des différentes phases de la pandémie , lors d’entretiens téléphoniques avec Alassane Ouattara, Président de la Côte d’Ivoire, et Macky Sall, Président du Sénégal, le Souverain a proposé la création d’une Alliance Africaine de lutte contre le coronavirus «Permettant un partage d’expériences et de bonnes pratiques ».
Dans la même veine, lors d’une réunion du Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine consacrée aux épidémies d’Ebola et de coronavirus, le Maroc a souligné la nécessité d’une action collective et urgente de l’Afrique, à travers le partage d’expériences entre les pays africains, soulignant à cet égard le rôle majeur de l’Afrique CDC (Centre de contrôle des maladies.)
Sa Majesté le Roi Mohammed VI a donc choisi de s’engager en faveur d’un plan d’aide, tourné vers l’action, pour faire face à l’impact sanitaire, économique et social de la pandémie sur le continent. En effet, l’Afrique est particulièrement touchée par le manque de financement et d’équipements notamment en matière de lits de réanimation et de respirateurs.
Toutefois, l’espoir reste de mise et les actions volontaristes sont les seules capables d’apporter un début de solution, car les capacités des systèmes de santé africains qui disposent d’une longue expérience de la lutte contre les épidémies et des virus, ne devront en aucun cas être sous-estimées.
Et bien qu’on puisse espérer que certains facteurs propres à l’Afrique puissent avoir un effet atténuant l’impact de la pandémie, tels que la jeunesse des populations, les faibles taux de pollution, le nombre peu élevé des cas de diabète ou d’obésité, il faudrait néanmoins renforcer très vite les capacités sanitaires, traiter les malades et limiter les pertes économiques, en s’appuyant sur les réseaux de surveillance épidémiologique africains et en mobilisant l’expertise marocaine dans ce domaine.
Cependant, pour que les solutions globales viennent d’Afrique, un certain nombre de conditions préalables devront être remplies : L’Union Africaine a déjà reconnu que l’Afrique sera plus forte si les pays sont davantage intégrés et unifiés avec la naissance de la zone de libre-échange continentale africaine. Un engagement tout aussi fort en faveur d’une action conjointe des dirigeants du continent profiterait sans aucun doute à la lutte contre la pandémie du covid-19 et ses conséquences économiques pour l’Afrique.
Ces actions devraient être en concordance avec les objectifs de développement durable et de multilatéralisme, avec l’engagement d’aider ceux qui seront le plus touchés par le ralentissement économique, notamment les petites entreprises, les femmes, les jeunes et les communautés vulnérables.
Une réponse adéquate à un agent hautement infectieux à émergence rapide comme le COVID-19 exige donc une forte collaboration, l’utilisation de nouvelles technologies et la mobilisation d’équipes pluridisciplinaires travaillant sur des solutions qui tiennent compte des circonstances particulières des pays africains, sans négliger les meilleures pratiques inspirées des parties du monde qui ont été les premières touchées.
Outre les défis sanitaires posés par le COVID-19, l’Afrique ressent déjà l’effet sur ses économies. Avec la fermeture des industries en Asie, en Amérique et en Europe, la demande de matières premières et de produits de base diminue, mais elle entrave également l’accès de l’Afrique aux composants industriels et aux produits manufacturés y compris les équipements médicaux. Or, La propagation de la pandémie a entraîné un besoin urgent de toute une gamme de fournitures médicales. Celles-ci vont de l’équipement de protection individuelle tels que les écrans faciaux, les masques chirurgicaux, les tests de prélèvement et de diagnostic, jusqu’aux respirateurs.
Ceci implique une collaboration régionale des décideurs politiques dans les domaines des produits pharmaceutiques, des désinfectants, des équipements de diagnostic et des vêtements de protection. C’est ici que l’expérience du Maroc peut s’avérer salutaire grâce à son industrie pharmaceutique locale, et le succès de production domestique de masques et de respirateurs, ceci doit inspirer d’autres pays à développer des approches faisant usage de leurs spécificités industrielles pour apporter leur pierre à l’édifice. Aucun pays ne pourra répondre seul mais ensemble l’espoir reste possible.